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Tenir un blog c'est recevoir des CD (dieu merci, cette chose-là existe encore) accompagnés de textes soignés sur les artistes en question. Généralement, cette biographie améliorée on y jette qu'un coup d'œil. A vrai dire, on préfère déblatérer sur la sensation procurée à l'entente de l'artiste que de calquer ses sens sur le petit texte en question, sur sa vie. On se dit qu'importe la personne, seul l'écoute subjuguante ou ennuyante nous intéresse. Or quand le texte qui présente l'artiste est signé par l'un de nos auteurs préférés, la tache se complique. Et pas qu'un peu. On enferme sa déontologie au placard, on la verrouille même. Je copierai bien ici mot pour mot ce que Nicolas Rey a écrit sur son complice radiophonique, sur son garçon manqué, Mathieu Saïkaly. Rey auteur aux légers passages à vide, chroniqueur radiophonique de génie, devenu l'allié d'un gagnant de la Nouvelle Star. En diagonale, Nicolas pour parler de Mathieu cite Elliott Smith, Boris Vian. Evoque la juvénilité du garçon, son espièglerie et termine sa charmante éloge par une expression sur le fil : « Un saltimbanque en état de grâce ». Que pourrais-je ajouter à cela ?

Mathieu Saïkaly : garçon cosmique

Je pourrais préciser que je n'arrive jamais à écrire/ prononcer le nom de Mathieu Saïkaly correctement. Que je fais donc ici un effort surhumain. Je pourrais ajouter que lors de son spectacle avec Nicolas Rey à la Maison de la Poésie, Mathieu Saïkaly chantait pieds nus. La première fois j'ai trouvé ça charmant. La seconde fois aussi. Là-bas aussi, son visage juvénile et doux conjuguait timidité attachante et sourire malicieux. La première fois et la seconde fois y compris. A chaque fois, à quelques centimètres de moi dans cette cave miniscule et hors du temps, il a chanté Cat Power et Elliott Smith et je me suis dit qu'il avait trouvé chaussure à son pied, la douce folk, le sentiment de destruction en moins semblait t-il. A chaque fois aussi, il a enchaîné les Gainsbourg, Souchon, Brel et je me suis dit qu'il avait un coup à jouer dans la chanson française. Au départ j'ai cru naïvement que j'allais à ce spectacle pour Nicolas Rey et la beauté des textes lus, mais en vérité après réflexions, j'ai compris que j'avais autant d'attention pour Rey que pour Saïkaly. Je me disais qu'il fallait être un type bien pour être ami avec un type pareil, qu'il fallait être un chic type pour chanter « I want you » de Dylan avec autant de fraîcheur, de naturel. Que c'était tellement puissant dans la douceur que le spectacle à peine commencé, j'en aurai chialer de cet instant-là précisément. La délicatesse de Saïkaly à reprendre sans prétention, tout en douceur, des classiques qui parlent à la mémoire collective c'était le sujet même de ce spectacle dont je ne me lasse pas d'écrire les louanges (ici notamment).

 

Pas de classiques sur le premier EP à venir (9 mars prochain) de Mathieu Saïkaly, juste un univers d'une douce folie. « Ses chansons se balancent toujours » écrit Nicolas Rey, peut-être parce qu'à 21 ans il a l'âge légitime pour se poser 15 000 questions, notamment sur ce premier titre, Cliché Cosmique. « Je me pers dans la danse des mots, le sens des choses ». Toujours en grattant sa guitare, toujours en imposant son rythme joyeux, sans agacer, sans énerver, juste ce qu'il faut comme dose pour contempler et sourire béatement. Saltimbanque au déséquilibre parfait, le jeune artiste chante aussi bien en français qu'en anglais ("From Glass to ice"), prolongeant avec grâce la comparaison avec Ellioth Smith qu'il reprend à merveille sur sa chaine You Tube ("Angeles", courez-y). Je me disperse... Comme Mathieu. Un chanson joyeuse, une qui spleen en anglais, une comme une ravissante berceuse, une instrumentale et une avec un texte lu de l'ami Nicolas posé sur un air de guitare puis de ukulele. La folie pure, douce, entre l'ivresse de vivre et de devoir mourir, entre un texte fou typique de Rey et la voix mélancolique de Saïkaly qui le ponctue. Ces deux garçons se sont si bien trouvés. Rey boucle par "Le fou n'a rien à dire mais il le dit en chantant" et Saïkaly boucle en chantant naturellement. Cet instant sur le fil, volé au temps, comme un désir de ralentir le mouvement d'un disque en lisant un texte prouve que l'artiste est à l'inverse de l'air du temps. Fou à sa manière. Pas pressé  et contemplatif de sa propre folie dans l'accalmie. Un artiste qui ralentit le rythme dans l'ultime but de satisfaire sa quête de compositions précieuses. Ca me revient maintenant, un des livres de Nicolas Rey se nomme La Beauté du geste. Le terme convient si bien à ce premier EP. La Beauté des gestes de Saïkaly, au chant, à la guitare, au ukulele, à l'écriture, à la compo. La beauté des gestes du jeune premier.

Tag(s) : #Musique, #Mathieu Saïkaly, #EP, #Nicolas Rey
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