Rien de grave

C'est comme si dans la vie, il y avait une touche "Repeat". Vous savez cette touche sur la chaine hifi que l'on enclenche quand on ne peut respirer sans entendre ce titre en boucle.... Hélas dans la vie, ce n'est pas vous qui appuyer sur cette touche, c'est la vie qui s'en charge pour vous. "Repeat" dit la vie...

Apparemment la vie fonctionne comme ça, et vous devez par conséquent suivre son mode de conduite. Moi, en tous cas je le suis parfaitement... Répéter les mêmes scènes, les mêmes titres, les mêmes mots, les mêmes erreurs et surtout relire les mêmes textes...

17 ans. "Il y a quelques secondes, je finissais de lire le roman de Justine Levy Rien de grave. A la dernière page, une phrase, toute bête, toute simple, toute vraie: "La vie est un brouillon finalement. Chaque histoire est le brouillon de la prochaine. On rature, on rature et quand c'est à peu près propre et sans coquilles, c'est finit on n'a plus qu'à partir. C'est pour ça que la vie est longue. Rien de grave."
21 ans et toujours cette même phrase qui me trotte dans la tête. La "sale petite garce au cœur sec qui regarde les gens méchamment les gens gentils" après son sale chagrin d'amour c'était moi, c'était elle, c'était nous toutes. L'auteure a signé ici Le livre sur la rupture. On entrouvre la première page et son cœur bousillé nous éclate à la figure. S'en suit une suite logique de phrases coups de poing sur la vie, l'amour, le couple,... Bousillée par la vie, par un homme, par une rivale, Louise se rattrape par la force des mots. Sa vie lui a échappé, tout lui a filé entre les doigts sans qu'elle n'ait eu le temps de comprendre. Alors elle se raccroche à sa plume, se réfugie dans les mots. Ces mots offrant la possibilité de tout contrôler, de maîtriser chaque virgule, de se croire à nouveau maître de sa vie.

Louise dit "ne plus avoir les mots qu'il faut". L'amour cause bien souvent des problèmes respiratoires, Louise voudrait être sous anesthésie. Mais peut-on apaiser un sale chagrin d'amour? Le sien il est de même proportion qu'un habituel chagrin d'amour, il est sans limite et accompagné de larmes bien chaudes... Toutefois, le sien il est connu. Il est... Comment dit-on déjà?... Ah oui, c'est ça "people"! Louise n'est pas Louise c'est la fille d'un philosophe connu et respecté, l'homme au trois consonnes: BHL. Louise n'est pas Louise, c'est aussi la femme d'un jeune philosophe connu: Raphaël Enthoven. Le beau père de Louise est aussi un philosophe de renom. Quant à la nouvelle belle mère de Louise, il est inutile de la présenter tellement son palmarès est étonnant: ex mannequin "au regard de tueuse", croqueuse d'hommes, interprète à la voix suave et plus récemment première dame de France. Forcément les langues de vipères ne pourront s'empêcher de descendre une telle œuvre, contée, à leurs yeux ,par une pauvre petite fille riche.... Certains n'y verront qu'une sale histoire d'amour, le récit d'une banale rupture comme la vie en inflige à chaque être chaque jour.

L'histoire de Louise on l'a connait par cœur, on l'a vécu, on l'a vu au cinéma, on l'a lu, on l'a entendu pourtant on ne s'en lasse pas. Cette histoire c'est la vie, alors bien évidemment la vie on n'y reste suspendu dans l'espoir secret de finir par la comprendre et de ne plus jamais refaire les mêmes erreurs. "Cassée en mille morceaux" Louise se souvient de leurs insouciance, leur désinvolture, leurs étreintes, leurs vingts ans, leur amis, leur complicité... Pourquoi tout ce qui les unissait a été détruit? A cause de Paula? A cause de la vie?... Louise ne sait plus, elle sait juste que ses larmes sont bien chaudes, et qu'elles la consolent... Elle envoie tout valser: les photos, les cadeaux, les lettres rappelant un amour à tout jamais perdu. Heureusement elle a sa bouée de secours: les médicaments. Ils apaisent la douleur. Hélas, ils ne sont pas assez forts contre ce titan qu'est le sale chagrin d'amour, elle voudrait être sous anesthésie après ce choc qui l'a "tchernobylisé".

Et puis un jour, celle qui a dit "Je t'aime est la phrase la plus bête du monde, je n'aimerai plus jamais personne" retombe amoureuse. Elle réapprend à vivre et surtout à aimer dans les bras de Pablo. L'homme qui lui a brisé le cœur est loin... Ou peut être encore là. L'introspection de Louise n'épargne personne et surtout pas son statue de pauvre petite fille riche et larguée. Elle balance ces mots, ces phrases comme cela vient: pour survivre après tout ça il faut une bonne dose d'ironie sinon on sombre. La descente en enfer avec les amphétamines, le cancer de sa mère, la dépression, son attitude puéril, Louise ne cache rien à son lecteur. Elle se livre avec un humour décapant. Même quand on touche le fond, il ne faut jamais prendre les choses sérieusement. Voilà la philosophie de la vie de Louise... Rien de grave, finalement.

Rien de Grave de Justine Lévy (Stock)