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Depuis quelques semaines, je ne cesse de penser qu'il faut refuser le débat, ne pas entrer dans le jeu, rester calme et ne déverser ni colère, ni haine sur le feu. Je me suis retenue... Jusqu'à aujourd'hui. C'était difficile d'entendre toutes ces conneries à la télévision, à la radio, dans les journaux. Mon dieu que mes contemporains sont débordants de conneries. Où serait-ce moi qui suis désespérante de conneries? Je méditerais la question, promis.


Depuis le débat lancé, j'ai pas mal surfé ici et là, sur Facebook notamment et ses groupes nauséabonds. L'un d'entre eux se prénommait « Fier d'être français ». J'étais admirative. Je trouve ça chouette. J'aimerais pouvoir en dire autant, en être capable. « Je suis fière d'être française » c'est pas difficile à dire mais ce n'est malheureusement pas dans mon vocabulaire. Mes yeux ont parcouru le mur de l'un de ces groupes nés suite à l'immense débat lancé par notre Ministre de l'Immigration et de je ne sais plus trop quoi. Un mur de la honte. Où les commentaires viraient à droite toute. A l'extrême de la droite. Là où on aime chanter la Marseillaise, afficher le beau drapeau tricolore et regretter le temps des colonies. Où l'on assène que des hommes sont morts pour ce pays. Là où la couleur et la différence ne sont pas respectées. « La France, on l'aime ou on la quitte » disait le mur de la honte. C'est de l'extrême de la droite ça, non?


 


Un matin, Eric Besson a lancé son site. Je me suis empressée d'aller faire un tour chez Monsieur Besson. J'ai flâné toute la matinée. Je me suis bien amusée à vrai dire. Il me semble que les mots respect, liberté, égalité et fraternité revenaient sans cesse dans les commentaires des citoyens français. Leitmotiv de la république, certainement. J'ai trouvé ça beau encore une fois. Puis j'ai regardé autour de moi et j'ai rien vu. Quelques lettres gravées sur chaque mairie de ma douce France suffisaient donc à illustrer le débat. Un débat bien comme il faut. Avec des frontières et des valeurs à ne pas bafouer. J'avais envie de jouer le jeu, d'être citoyenne, un peu ou beaucoup. Le midi, Bruce Toussaint m'a dit que le débat était truqué. Comment avais-je pu être dupe? Comment tous ces gens participant au grand débat sur l'identité nationale avait pu être dupes de la mascarade maladroite du clan Sarkozy? J'ai été stupide. J'ai oublié que la peur de l'autre, l'insécurité et la fierté d'être français étaient des ingrédients nécessaires pour réaliser une bonne recette pour les prochaines échéances électorales. On prend les mêmes et on recommence.


Quelques jours plus tard, après m'être égarée dans les lignes en ligne du faux-débat, j'ai compris une chose : Eric Besson est un objet de scandale à la tête d'un ministère scandaleux. Il était tard et pourtant les yeux fatigués mais fascinés, j'ai regardé Eric Besson. « L'irrésistible ascension de M.Besson » disait le titre de l'interview. J'aurais été Guillaume Durand, « L'Etrange Histoire d'Eric Besson » m'aurait semblé plus bankable et racoleur comme titre. Peu importe... Il était là. Une sale tête ce type. Mais ce n'est pas un argument suffisant. Je sais. Il est même minable cet argument. Mais un type disant : « Je suis là pour être une machine à fabriquer des citoyens rationnels » n'a t-il pas à cet instant une sale tête. Eric Besson vous souhaite la bienvenue dans son meilleur des mondes où l'on fabrique avec efficacité de bons citoyens et où, je pense, Guillaume Durand serait vite expulsé pour son refus de complaisance avec le Ministre scandaleux. Il était tard, je suis allée me coucher après avoir lu quelques lignes de Camus. Besson l'avait cité dans son interview. Je me suis endormie en me demandant ce que le philosophe aurait pensé de la France d'aujourd'hui...


En une semaine, mes petits yeux étaient choqués par tant de visages haineux, mes oreilles lassées d'avoir entendu tant de bêtises humaines et d'intolérance et j'étais fatiguée de toute cette mascarade à laquelle on ne peut répondre. Puis hier soir, je suis tombée sur elle. Elle avait bercé mais 16 ans et ma modeste rébellion contre l'ordre établi. Elle avait bouleversé mes 19 ans et mon rejet de la politique sarkozyste. Ce soir, elle revenait pour me foutre une claque en pleine gueule. « Et parti comme c'est parti, ce morceau va faire mal » rappait-elle. Elle avait ses défauts et ses qualités. Comme tout le monde finalement. Ce soir, sur le plateau du Grand Journal, elle n'avait pourtant que des qualités. Les mêmes que ce fameux soir où sur le plateau d'une chaine concurrente, elle avait entonné son sublime Marine. Des années plus tard, sa verve d'écorchée vivre n'avait point perdu de son talent. Elle était là. Rappeuse aux textes les mieux ciselées du rap française, elle rappait toujours et comme personne d'autre. Unique. Parce qu'elle est la seule à si bien parler de notre pays et de notre société actuelle. En cinq minutes tout était dit. Avec clichés parfois et vérités tragiques souvent, elle a pulvérisé le pseudo-débat sur l'identité nationale avec sa langue, la langue de Molière. Avec un « je vous emmerde » finale, enthousiaste et naïf, elle a mis KO les politiques intolérants et les citoyens qui rentrent dans leur jeu. L'espace de cinq minutes,  grâce à elle, j'aurai pu dire avec sincérité « Je suis fière d'être française ». Parce que Ma France à moi, c'est pas la leur.

 

Tag(s) : #Politique
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